Lettrines ArboSciences

Moi

Multiple facettes (Eric Berne, novembre 2004)

"Le Moi remplit les fonctions de relation avec le milieu, il canalise les pulsions, les harmonise entre elles et avec la réalité ambiante. Il contrôle les fonctions de la mémoire et de la pensée. Il adapte les pulsions du ça aux conditions imposées par le monde extérieur. Il est régi par le principe de réalité."

Ces trois états font que nous pouvons nous comporter dans la communication _avec autrui, mais aussi avec nous même, en dialogue intérieur_ comme si nous donnions momentanément la parole à l'une de ces trois personnes.

Ces trois états de notre personnalité sont appelés : le Parent (imitation), l'Adulte (réflexion) et l'Enfant (impulsion).

Nota Bene : Nous sommes bel et bien une personne unique, avec une personnalité unique, et il ne s'agit pas de considérer qu'il y a "plusieurs personnes en nous". Notre personnalité comporte simplement de nombreuses facettes, de multiples manières de s'exprimer, et ces trois états du Moi discernés par Eric Berne ne sont que trois de ces multiples facettes. On pourrait aussi parler de "longueurs d'onde" que nous utilisons pour communiquer.

L'automobile-utérus (site web Volodalen, 2015)

Le sociologue américain Erwing Goffman United States assimile l'habitacle automobile à "une sphère exclusive du Moi". D'où, au volant, une très forte territoralité qui rime trop souvent avec agressivité, encore accentuée dans les embouteillages : klaxons, coup de freins, appels de phares, jurons ou gestes obscènes.

Un nombre croissant de psychiatres n'hésitent plus à comparer notre chère voiture à une enveloppe utérine dans laquelle nous ne communiquons que selon un mode régressif.

"C'est l'automobile-utérus, un carcan souvent conçu, hélas, pour couper la communication entre usagers de la route, une seconde maison où triomphe l'individualisme ambiant", déplore Pascal Assailly, psychologue spécialisé dans les comportements routiers.

Sans oublier, comme l'explique le sociologue Jean-marie Renouard, que "prendre le volant reste un paradoxe : c'est une pratique fondamentalement individuel qui s'exerce sur des routes où l'on vit en collectivité".

Illustration (Didier Weiss & Alain Eskenazi, juillet 2022)

Description

Ce "Moi" est un concept qui me décrit, qui définit mon personnage avec ses connaissances, ses pensées, ses émotions; il s'agit donc d'une simple description.

Dissociation

Par inadvertance (inattention), "moi" est pris pour un sous-ensemble indépendant de la totalité de l'expérience : formes, couleurs, sons, sensations, pensées, émotions, et cetera ...

Selon cette lecture de la vie, "moi" serait un premier sous-ensemble défini & limité, et tout le reste, "non-moi", "ce monde extérieur à moi" formerait un second sous-ensemble (Monde Extérieur versus Monde Intérieur).

Identification (Malo Aguettant, août 2022)

Sous contrôle

Cette partie de notre Être s'identifie à nos émotions, lesquelles changent sans cesse.

Le Moi est dépendant des fluctuations de la vie émotionnelle. Il est le produit des conditionnements & de l'histoire personnelle.

Jeu de rôles

Le moi que nous sommes construit, se renforce au fur et à mesure des événements que nous traversons. Ce moi s'efforce de neutraliser la nouveauté contante de la vie en utilisant toutes sortes de stratagèmes qui fonctionnent comme un rituel magique & dérisoire.

En général nous avons plusieurs "moi" de substitution et nous choisissons celui qui nous paraît le plus adapté à la situation. Mais c'est un "moi" complètement momifié depuis des années que nous utilisons pour aborder les nouvelles situations qui ne cessent de se présenter.

Sous prétexte que cela a marché quelquefois dans le passé, on essaye de se convaincre qu'en présentant un masque soit de victime, soit de conquérant ou d'un autre personnage, on va pouvoir négocier avec la réalité.

Mais il n'y a rien à négocier. Ce qui est, c'est ce qui est. Si le parasitage incessant des opinions (mental) s'arrête un instant, l'espace de silence que nous sommes n'a plus rien à négocier et peut accueillir la situation telle qu'elle se présente.

On peut alors faire face à ce qui est sans rien ajouter, sans rien retrancher, sans interpréter. C'est seulement à ce prix que l'on peut réaliser qu'il n'y a pas d'un côté moi, et de l'autre, la situation.

Nous faisons partie de la situation qui est en train de se dérouler dans l'instant. Il ne nous est jamais rien arrivé. Il ne peut jamais rien nous arriver en ce qui concerne ce que nous sommes. Nous reconnaissons alors que le moi est une simple fonction de relation avec le milieu dans lequel il se trouve.

Nous sommes la situation qui arrive, la bonne comme la mauvaise nouvelle, la catastophe comme l'extase la plus sublime, ainsi que la quotidien le plus banal.

Mental

Le mental désigne la faculté de penser prise en otage par le moi. Le mental a comme préoccupation systématique, exclusive, quasiment pathologique, de défendre & renforcer cette image du moi, que l'on appelle aussi l'ego.

Il n'y a aucune objectivité aucune rigueur à attendre de ce mental. On ne peut pas lui faire confiance.

C'est une raison de plus pour être rigoureux & vigilant en abordant la recherche de ce qui est.

Le mental vient aussi interférer dans notre vie émotionnelle. La défense de l'ego implique une mobilisation des émotions qui sont réduites aux seules expressions de la peur & de l'agressivité. Elles ne peuvent plus alors exprimer toute la richesse & toutes les nuances de votre relation au monde & à nous-même.

Généralement, le réflexe du mental consiste à filtrer tout ce qui est inattendu, imprévu, tout ce qu'il ne peut pas contrôler.

Systématiquement, dès qu'il y a émotion (désagréable, inconfortable), nous pouvons être sûr que le mental est entré en action pour tenter de contrôler ce qu'il considère comme une intrusion de la réalité dans son rêve.

L'approche est ici d'essayer d'identifier & de remarquer l'arrivée des idées délirantes du mental (comme par exemple de s'inventer un nouveau rôle de victime ou de héros), et de prendre cela comme un jeu.

Ce n'est qu'à partir du silence que vous êtes que vous pouvez réellement l'entendre (le mental, dans toutes ses facéties & ses extravagances).

Pour le mental, ne pas se considérer comme l'auteur de son existence ou de ses actions, est tout simplement inconcevable.

Pour lui, l'actionne peut se concevoir qu'à partir d'une entité séparée, le moi, qui contrôle l'environnement & cherche à atteindre son but.

Point de rupture

Notre mental construit la prison du moi dans laquelle nous nous sentons enfermés. Le simple fait de voir que celui qui cherche à se libérer et celui qui construit les murs de la prison est le même. Cela signifie que nous voyons enfin les choses sous un regard neuf, comme si enfin nous observions la situation vue de l'extérieur.

Nous apercevons celui qui monte les murs (l'ego), et nous constatons également celui qui est prisonnier dans l'enceinte (le moi). En réalité, nous ne sommes pas le mental (ego, moi), nous sommes Je (l'Être).

Le subterfuge est alors démasqué. La tension qui alimentait la recherche tombe d'un seul coup. Seul demeure ce qui est.

L'éveil, ce n'est pas quelque chose en plus, mais quelque chose en moins. Ce serait plutôt la soutraction d'une illusion, la fin d'une apparence.